Nature 18 dit non aux épandages aériens de pesticides !

danger-pesticides-cher

Dispersés hors des champs, les pesticides sont présents partout. On en retrouve dans nos aliments, dans l'eau, dans l'air, dans les sols, mais aussi dans le sang et même dans le lait maternel. Ils pénètrent dans l’organisme par voie cutanée, par inhalation, par ingestion. Ces poisons sont responsables d’un nombre de plus en plus important de maladies chroniques. Dans un communiqué dont vous lirez ici de larges extraits, l'association Nature 18 alerte les habitants du Cher sur les dangers représentés par l’utilisation massive des pesticides, et notamment via les épandages aériens qui se multiplient .

> Les épandages aériens de produits toxiques sont interdits par une loi de mars 2004. Cependant, dans la loi Grenelle II, la possibilité de dérogation est prévue par la directive 2009/128, mais uniquement "dans des cas particuliers et sous conditions"

Une circulaire publiée en toute discrétion début mars 2012 par le Ministère de l'agriculture français ouvre la voie à de nombreuses dérogations (voir dans gilblog "Épandages aériens de pesticides, attention !"). Les dérogations concernent sept pesticides, utilisés pour traiter "dans certaines situations ayant un caractère d'urgence", les cultures de maïs et de vigne, et aussi de bananier et de riz dans les départements d'outre mer. Six de ces produits sont classés "dangereux pour l'environnement" et "nocifs" sur le plan toxicologique. La liste des produits susceptibles de bénéficier d'une dérogation pourrait encore s'allonger, puisque seize autres pesticides sont à l'étude auprès de l'Agence nationale de sécurité sanitaire de l'alimentation, de l'environnement et du travail (Anses). 

Il est étonnant de constater comment un texte rédigé à la suite de l’obtention d’un consensus peut être dénaturé petit à petit et passer du glissement au dérapage et déboucher sur une pluie de dérogations souligne Nature 18 ! Parmi les conditions de dérogation d’épandage aérien figure la réalisation d'une évaluation spécifique des risques liés à l'évaluation aérienne. En France, cette évaluation est confiée à l'Anses. 

L'autorisation des produits pour des applications par voie aérienne est conforme à l'arrêté du 31 mai 2011. En effet, il avait déjà opéré ce glissement du principe d'"interdiction sauf dérogations", inscrit dans la directive et la loi Grenelle 1, vers une pratique de dérogations organisée. 

Au 20 février 2012 sept pesticides avaient fait l'objet de cette évaluation spécifique de l'Anses et vu leur autorisation de mise sur le marché modifiée en conséquence. Il s'agit de fongicides, herbicides, insecticides et stimulateurs des défenses naturelles pour une utilisation sur les cultures de bananiers et de riz. 

Selon l’association Générations futures, les sept pesticides autorisés présenteraient un risque pour la faune et la flore. Par ailleurs, trois d’entre eux seraient classés comme cancérigènes possibles par l’agence américaine de protection de l’environnement, et un autre classé toxique pour le développement aux Etats-Unis. Résultat, huit cents opérations d'épandage aérien seront autorisées cette année en France ! 

Dans la très discrète circulaire du Ministère de l'agriculture, seize nouveaux pesticides apparaissent comme étant en cours d'évaluation par l'Anses. "Ces produits peuvent en conséquence être intégrés dans les demandes de dérogation formulées par les opérateurs", indique le document. Qui précise que, dans les cas où l'évaluation des produits ne serait pas terminée au 31 mars 2012, date limite de dépôt des demandes de dérogation annuelle pour les traitements aériens, les dérogations pourront être octroyées "sous réserve que les produits utilisés aient bien été autorisés spécifiquement au moment de la déclaration préalable de chantier". Générations futures ajoute que dix sur les seize substances en cours d’évaluation présenteraient en plus un risque avéré pour l’environnement". 

Il fallait bien écarquiller les yeux en lisant le Berry du 26 avril pour trouver deux avis de  demande de deux sociétés en vue d’obtenir une dérogation annuelle pour l’épandage par voie aérienne de produits dits "phytosanitaires" sur plusieurs communes du Cher. Encore plus étonnés les lecteurs de Nature 18 se sont rendus compte qu’une troisième demande de dérogation était faite, mais cette fois sur le site de la Préfecture du Cher. On est en droit de s'interroger sur ne telle méthode "d'information" du citoyen. 

Alors que la Préfecture se voit ouvrir les colonnes du Berry quand elle le veut, est-il normal que ces avis de consultations publiques se fassent de façon aussi "discrète" et éparpillée  ? L'association Nature 18 pense que non, et publie à nouveau les demandes concernant le département du Cher afin que l'information soit connue : 

SAS Giragri 17 - Communes de Vornay, Bannay, Berry-Bouy, Quincy, Saint Michel de Volangis, Marmagne, Châteauneuf sur Cher et Chavannes. Lutte contre la Pyrale. Arrêté préfectoral du 16 avril. Avis de consultation publique du 20/04 au 20/05/2012.

Trans-Heli - Commune de Sainte Thorette. Lutte contre la Pyrale. Arrêté préfectoral du 16 avril. Avis de consultation publique du 20/04 au 20/05/2012.

Viragri - Communes de Sancerre, Bué, Crésancy-en-Sancerre et Ménetou-Ratel. Lutte contre le Mildiou, l’Oïdium et le Black rot. Arrêté préfectoral du 16 avril. Avis de consultation publique du 20/04 au 20/05/2012. 

Ce n’est pas sans raison que les associations de protection de la nature et de l’environnement ont demandé, lors du Grenelle de l’environnement, l’interdiction des épandages aériens, c’est parce qu’ils cumulent tous les risques de dispersion des pesticides. On peut imaginer l'impact sur l'environnement et la santé humaine d'un épandage en altitude de grande quantité de pesticides, même si une distance de cinquante mètres doit être observée par l'opérateur par rapport aux jardins, habitations, plans d'eau (alors qu'une étude américaine montre qu’une exposition dans un rayon de cinq cent mètres de la zone d’utilisation de certains pesticides augmente de 75% le risque de développer la maladie de Parkinson !). Autres obligations pour pouvoir épandre par voie aérienne, avoir de bonnes conditions météorologiques (pas de vent, pas trop de soleil, pas trop d’humidité…), changeant d’heure en heure. La décision d’épandre sera donc prise au maximum dans la demi-journée précédente. Comment respecter la dernière obligation qui est de prévenir la population de façon efficace en aussi peu de temps ? Les Maires des communes concernées apprécieront.

Mais ce n'est pas tout, car des demandes de dérogations sont apparues un peu partout en région Centre. 

Dans l'Indre, par arrêté préfectoral du 13 avril 2012, une consultation été ouverte sur la demande du Gaec Deloche visant à lutter contre la pyrale (Ostrinia nubilalis). La demande de dérogation est consultable jusqu’au 16 mai 2012. 

Dans le Loir-et-Cher, par arrêtés du 11 avril, 2 consultations ont été ouvertes sur la demande des Conserves du Blaisois et de Pissier visant à lutter contre la pyrale. Les demandes de dérogation étaient consultables jusqu’au 07 mai. 

En Eure-et-Loir par arrêté du 21 mars, une consultation a été ouverte sur la demande de la société Leplatre SA visant à lutter contre la pyrale. La demande de dérogation était consultable jusqu’au 30 avril 2012. 

Dans le Loiret le 21 avril paraissait dans la Nouvelle République un avis impliquant la société Trans Heli (un autre article dans ce même journal confirmait la responsabilité de la dite société pour épandage illicite d'un puissant insecticide "Karaté K" sur un champ de maïs d'Épieds-en-Beauce en 2009, causant la perte de milliers d'abeilles). Il apparait en fait que trois épandages différents sont concernés par des demandes de dérogation. Le plus important est celui de la société Leplatre, consultation qui s’est clôturée le 7 mai. Cette entreprise était liée à Trans Héli dans le dossier d'utilisation de "Karaté K" sur un champ de maïs d'Épieds en Beauce... 

Par arrêtés préfectoraux du 17 avril 2012, deux consultations publiques sont encore ouvertes sur la demande des Sociétés Trans Heli et Pissier visant à lutter contre la Pyrale du maïs ... 

Faut-il donner des dérogations d’épandage massif et imprécis à des gens ayant déjà montré leur inconscience face aux problèmes posés par l’utilisation de ces produits dangereux, alors que le Trichogramme est un agent auxiliaire des cultures qui a prouvé son efficacité, interroge Nature 18 ? 

Dominique Marchal

Pourtant, en 2005, vingt deux pesticides différents sur quarante cinq recherchés ont été détectés dans l’air en Région Centre au cours d’une campagne de mesure. Des pesticides, dont certain, comme le lindane, interdit d’utilisation depuis 1998, ou le trifluraline, sans d’autorisation de mise sur le marché depuis 2008, arrivent en tête des pesticides détectés. D'autres, le Chlorothalonil (fongicide) et l’oxadiazon (herbicide) sont détectés pratiquement durant toute la campagne de mesure. 

> Depuis des années des dizaines d’études épidémiologiques montrent que les utilisateurs de pesticides sont plus souvent atteints par certains cancers que la population générale. 

Les tableaux des maladies professionnelles en agriculture viennent d’être révisés par un décret publié le 6 mai 2012 au journal Officiel. Un nouveau tableau fait son apparition et relie la maladie de Parkinson à l'exposition aux pesticides. "Il est créé au vu de l'état des connaissances chez l'homme permettant d'établir un lien de causalité entre la maladie de Parkinson et les pesticides", peut-on lire dans le décret. 

Une étude américaine de 2001 montre que la mort du foetus due à une anomalie congénitale est plus fréquente chez les mères qui vivent pendant leur grossesse dans une aire de quinze kilomètres autour d’un endroit où l’on a pulvérisé des pesticides. 

L'Organisation Mondiale de la Santé (OMS) a estimé qu'il y a chaque année dans le monde un  million de graves empoisonnements par les pesticides, et deux cent vingt milles décès. 

> Mais les évaluations médicales sont incomplètes car elles ne concernent que les molécules isolées, alors que dans la nature les organismes sont exposés à de nombreuses autres molécules. Cet "effet cocktail" n’est jamais pris en compte ! Pourtant, grâce à des analyses capillaires, le laboratoire Kudzu Science a pu détecter une quarantaine de pesticides d’usage quotidien. Quelque soit le profil des personnes testées (utilisant ou non des pesticides, mangeant ou non bio), tous présentaient entre un et vingt trois pesticides différents dans leurs cheveux ! 

Une étude espagnole réalisée en 2007 montre que 100% de trois cent huit femmes enceintes suivies, ayant ensuite donné naissance à des enfants en bonne santé entre 2000 et 2002, on a trouvé au moins un type de pesticide dans le placenta. Le placenta de ces femmes contenait en moyenne huit substances chimiques différentes, et parfois jusqu’à quinze. 

Cette déclaration vient à point pour alerter un peu plus l'opinion. Rappelons qu'il y a peu l'Association de veille environnementale du Cher appelait les berrichons à prendre connaissance des dossiers de la consultation publique et à y inscrire leurs remarques.


> Nature 18. 

Rue Henri Moissan 18000 Bourges. 02.48.70.76.26 

Courriel : nature18@club-internet.fr 

>  Avec. Association de veille environnementale du Cher.  

Le Gros Chêne - 18110 Saint Palais. 02 48 66 08 20. Courriel : avec18@laposte.net