Les pieds dans l'Sordon.

Les nouvelles histoires de Berlaudiot.


sieste-bord-ruisseau

Il fait chaud, quatre pêcheurs finissent leur sieste à l'ombre des peupliers près du Sordon, le ruisseau de La Charnivolle. Ils sont bredouilles et les musettes du casse croûte et la bouteille de sauvignon sont vides. Ils commencent à s'ennuyer. 

L’un d’eux, j’cré bin qu’ c’est Antoine Massicot, aperçoit la silhouette de Berlaudiot qui avance sur le chemin. 

C’est-y Berlaudiot ? qu’y d’mand’. 

Dame oui, c'est bin Berlaudiot, j'le r'connais bin, dit l'Émile Turpin. 

Il a l'air tellement achaubourdé, que j'parie qu'on va pouvouér y jouer un tour, dit Julien Testard.

Ah bin oui, mais qué don tour ? demande Massicot.  

Vite ! Mettez vous les pieds dans l'Sordon coum' moué. On y dira qu'y sont collés au fond d'liau pasque l'Albert Marlou nous a empicassés ! dit Julien Testard.

On l'appelle ? Chuchote Massicot.

Non ! répond Turpin, si on le laisse causer l'premier, y s'dout'ra d'rin.

Berlaudiot s'arrête près des pêcheurs et les salue. 

Bonjour, les gars, dit Berlaudiot, qui don qu'vou avez pour vous t'nir comme des têtiaux plantés dans l'Sordon ?

Les pêcheurs poussent du coude le Julien Testard pour qu'il parle.

Bin, Berlaudiot, on est bin embêtés !....

Vous avez des ennuis ? Comment qu'c'est ty que j'peux vous agider ? Dit Berlaudiot, en se  déchaussant pour se rafraîchir les pieds dans le ruisseau.

Dame, si toué tu peux pas nous agider, personne le pourra et on d'vra rester debout ici les pieds collés dans l'Sordon. L'marlou y nous a empicassés. Qui donc qu'on pourrait faire ?

Berlaudiot regarde attentivement dans l'eau pour essayer de comprendre le maléfice. Mais il ne voit que huit grands pieds poilus.

Tu vois donc pas c'qu'est arrivé, Berlaudiot ? Nos pieds sont tout emboulagés. J'crois bin que c'pied-ci et pis c'pied-là y sont à moué, mais l'Antoine dit qu'c'est les siens. 

Et moué j'te dis que ce pied là et pis çui là sont à moué ! proteste Turpin.

Et moué j'te dis qu'c'est l'mien ! dit Massicot.

Et chacun fait semblant de réclamer les pieds de l'autre. 

Berlaudiot hoche la tête et gémit un bon coup pour montrer qu'il est désolé. Il remonte sur la rive et empoigne une grosse branche qui traînait par-là.

J'vas vous agider à r'trouver vos pieds ! dit-il, et il donne un grand coup de bâton dans l'eau devant les pêcheurs. 

Mais les farceurs ont tous déjà sauté sur la berge pour éviter le coup.

En rigolant, Berlaudiot remet ses chaussures et reprend son chemin.

J'suis bin content d'avoir démêlé vos pieds les gars ! Et app'lez-moué la prochaine foué que vous les perdrez ! 



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