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Comment Doux a plumé ses employés, les consommateurs et les contribuables.

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Le poulet Doux a vraiment un goût amer, écrit Claude-Marie Vadrot dans Politis en évoquant le désastre pour les salariés futurs chômeurs, et pour les mille éleveurs de poulets de batterie dont les déjections empoisonnent (en nitrate notamment), les rivières et les nappes phréatiques. Charles Doux est ce producteur français (et mondialisé) de poulets, de filets bas de gamme, de chair reconstituée  et de viandes enrobées emballés sous plastique. La principale caractéristique des produits Doux était leur médiocre qualité et leur prix bas. Le groupe Doux s'est trouvé en déficit pour des raisons encore mal connues (dettes pour l'achat de sa filiale brésilienne ?) alors qu’il recevait chaque année de cinquante à soixante cinq millions d’euros de subventions à l’exportation grâce à la Politique agricole commune européenne (PAC). Ce qui lui permettait de vendre ses poulets congelés moins cher que les poulets locaux sur le marché africain et a causé la ruine des petits éleveurs ruraux de ces pays. Le propriétaire de "Père Dodu" et autres produits de la malbouffe employait environ trois mille cinq cents personnes en France et six mille au Brésil. Avec cette délocalisation Doux réalisait une grosse partie de la production des deux cent cinquante trois millions de poulets chimiquement et artificiellement nourris (antibiotiques inclus). L’abattage avait lieu six semaines au plus après la remise des poussins de quelques jours aux paysans éleveurs du début de cette chaîne de la malbouffe "toujours moins chère".

Charles Doux (cent quarante sixième fortune de France avec plus de trois cent millions d'euros), traitait ses salariés comme des esclaves modernes : salaires au SMIC et travail par cinq degrés celsius. Ces conditions de travail étaient difficiles et les accidents du travail et les arrêts maladie étaient fréquents dans ses usines. Les intérimaires et les CDD y étaient encore plus mal traités et plus mal payés. Ajoutons pour compléter le tableau : la chasse aux syndicalistes, le harcèlement et la mise à pied des contestataires.  

Dans l'hebdomadaire Marianne du 11 août, Jean-Claude Jaillette révèle un autre scandale. Une des astuces de Doux aurait consisté à produire des poulets à coût très bas au Brésil, puis de les rapatrier en France pour les exporter au Moyen-Orient. Les poulets étaient reconditionnés en France ce qui permettait de les déclarer produit français, et de bénéficier des aides de la politique agricole commune. Montant : cinquante cinq millions d'euros en 2011, un milliard en quinze ans, financés par les impôts des européens (dont une partie sont les nôtres). Et c'est légal.

Depuis, Doux se serait fait prendre par les douanes, qui lui réclament six millions d'euros de trop-perçu en 2011. Cette information figure dans un rapport interne du ministère de l'Agriculture que le journaliste de Marianne a pu consulter.

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Selon Marianne, quatre-vingt-dix pour cent des volailles congelées du groupe présentaient une teneur en eau supérieure à la norme. Après abattage, les poulets du Brésil étaient trempés dans de la saumure (ce qui augmente la quantité d'eau retenue). En clair, le poids aurait été frauduleusement augmenté par de l'eau plutôt que par des céréales (double bénéfice pour le groupe, sur les coûts de production et sur les volumes) !

Et certains appellent ça un chef d'entreprise ! En réalité ces espèces d'hommes d'affaires n'ont de talent que pour contourner les lois et bénéficier des aubaines distribuées par les Pouvoirs publics. "L'expert de la volaille depuis toujours" comme il s'intitulait était surtout expert pour plumer ses concitoyens ! La "réussite" et les profits de Doux ne devaient rien au talent d'entrepreneur de leur patron ! Espérons que les futurs repreneurs des entreprises Doux ne poursuivront pas ces combines.

En tous cas, la volaille a bien un goût amer pour les deux cent quarante salariés de l'abattoir de dindes de Blancafort et les mille sept cents employés des autres sites de Châteaulin, Redon, Graincourt ...etc sans oublier les nombreux sous traitants qui attendent d'être payés. Pour le moment, cinq offres de reprise partielle de la branche frais du groupe Doux ont été déposées au tribunal de commerce de Quimper. Les groupes Duc, Glon Sanders, Axereal, LDC et les salaisons Tallec sont sur les rangs et en compétition pour certains sites. Charles Doux présente de son côté un plan financé par la banque HSBC, il a du culot ! 

Les syndicats des salariés de Doux estiment que ces offres poursuivent "le dépeçage du groupe". Pour la Confédération générale du travail (CGT) "Le gouvernement a l'obligation politique et le devoir moral d'arrêter ce massacre en contestant la décision du tribunal de Quimper. La mise sous tutelle publique revendiquée par la CGT permettrait la construction d'une solution pérenne pour l'avenir du groupe et de la filière avicole française afin d'éviter cette catastrophe sociale et économique pour l'ensemble de la filière et des territoires." Il y a du vrai là dedans, car si le gouvernement, messieurs Ayrault et Montebourg veulent vraiment des emplois pour les français, les méthodes classiques ne suffiront pas.

Yves Fromion qui défend le Cher et ses habitants "en coulisse", ignorait sans doute tout ça quand il est allé serrer des mains à l'usine Doux de Blancafort pendant la campagne électorale, et lors de sa rencontre mardi 12 juin avec Charles Doux au siège du groupe à Châteaulin. Son esprit aurait peut-être été alerté s'il avait mangé du poulet "Père dodu" ....


> Sources. Article de CM Vadrot dans Politis : http://www.politis.fr/Gastronomie-est-il-vraiment,18529.html

Courrier de Yves Fromion aux salariés de l'usine Doux de Blancafort : http://www.fromion.org/index.php/reactions/153-courrier-aux-salaries-de-l-usine-doux-de-blancafort

Article de Jean-Claude Jaillette en page 12 de Marianne numéro 799 du 11 août 2012.

Le télégramme.com. Doux. Reprise du pôle frais : cinq candidats, un millier d'emplois menacés. http://www.letelegramme.com/ig/generales/regions/morbihan/doux-reprise-du-pole-frais-cinq-candidats-un-millier-d-emplois-menaces-10-08-2012-1802214.php

Dans gilblog, lire "Doux et le gloubiboulga synthétique 100 % déchets"  http://www.gilblog.fr/vu_sur_le_web/doux-et-le-gloubi-boulga.html