Nouvelles de Fukushima (10).

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Lundi 29 février 2016, trois patrons japonais du secteur de l’énergie ont été inculpés. Ce sont les sieurs Tsunehisa Katsumata président de “Tokyo Electric Power Company” (Tepco), Sakae Muto, vice-président et Ichiro Takekurowere, conseiller technique. Ces tristes sires sont officiellement accusés de négligence dans la catastrophe de la centrale nucléaire de Fukushima en 2011. “C’est la première fois que la justice va devoir se prononcer sur la culpabilité de quelqu’un dans la survenue de l'accident nucléaire de Fukushima”, a noté la chaîne de télévision publique NHK.
Les plaignants ont finalement eu gain de cause après une bataille judiciaire de longue haleine ; en effet un précédent avis de la justice nippone avait estimé, en janvier 2015,
“que les preuves n'étaient pas suffisantes”. Pour l’avocat Yuichi Kaido “Le rôle de l'Etat doit aussi être questionné, de même que celui de l'autorité de régulation nucléaire à l’époque", estime-t-il. L'avocat pense que le procès permettra d'établir des vérités dans une affaire de camouflages”. Un procès cinq ans après les faits, enfin, mieux vaut tard que jamais.

> Rappelons qu’un séisme d’une magnitude de 8,9 sur l’échelle de Richter (le plus violent de l’histoire du Japon), a frappé le nord-est du pays le 11 mars 2011, déclenchant un tsunami qui a dévasté la côte. Le séisme a été suivi de nombreuses et puissantes répliques. Trois réacteurs de la centrale Dai-ichi de Fukushima ont fondu après avoir été endommagés par le séisme et le tsunami. L'accident a causé une énorme fuite radioactive tout le long du littoral. Des dizaines de milliers de personnes ont du être évacuées.
Cinq ans après la catastrophe, environ cent mille japonais sont toujours comptés comme personnes déplacées. Des dizaines de milliers d’habitants de Fukushima vivent encore dans des logements provisoires. Quelques secteurs aux environs de Fukushima ont officiellement rouvert l’accès pour les anciens habitants, mais nombre d’entre eux ne retournent pas chez eux par manque de confiance dans les déclarations officielles sur l’absence de risques. Cette population d’environ 160 000 personnes (l’équivalent de Toulon ou Grenoble), affronte la situation que lui ont légué les technocrates de Tokyo. 

> Depuis la catastrophe, quatre réacteurs nucléaires ont été remis en activité, malgré la promesse gouvernementale d’arrêter tous les réacteurs nucléaires du Japon en 2011.

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> Mercredi 24 février, Tepco a fait un nouveau mea culpa. Cinq ans après la catastrophe de Fukushima (!), l'opérateur de la centrale a avoué avoir minimisé la gravité de l'état des réacteurs en niant, puis en ne reconnaissant pas aussi rapidement que possible, le fait que trois réacteurs étaient en fusion. "Nous nous excusons profondément pour avoir affirmé, par erreur, que rien ne permettait de déterminer qu'une fusion du cœur de réacteur était en cours", a déclaré Tepco lors d'une conférence de presse et dans un communiqué.

> Dans Fukushima, la “Nuclear Regulation Authority” (NRA) retire 70 % de ses bornes de surveillance de la radioactivité. La NRA a déclaré le 10 février 2016 qu’à partir d’avril 2017, elle abandonnera 2 500 de ses 3 600 bornes de surveillance installées dans la préfecture de Fukushima. La raison invoquée est le manque de ressources budgétaires et matérielles. Les 2 500 bornes retirées sont situées dans les établissements publics dont les écoles. La NRA déclare qu’il n’y a pas eu de changement significatif détecté récemment. Mais les habitants constatent que les bornes sont régulièrement éteintes “pour maintenance”.

> À la centrale, les fuites continuent et la radioactivité augmente. Le 5 février 2016, Tepco rapporte que la radioactivité en strontium 90 est montée de 1103% dans les eaux souterraines proches du réacteur 2. L’échantillon a été pris entre le port de la centrale et le réacteur 2. Le puisard d’échantillonnage est l’un des rares trous d’observation situés hors du périmètre du mur souterrain construit pour tenter d’endiguer les fuites. Le relevé est de 3 200 000 Becquerels/m³. Le précédent record était de 290 000 Becquerels/m³.Il y a cinq puisards dans cette zone extérieure au mur souterrain, mais Tepco cache toujours les données relevées dans deux d’entre eux.

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> La radioactivité s’étend loin autour de Fukushima. On relevait la présence de l’iode 131 dans deux stations d’épuration de Tokyo en décembre dernier a annoncé le “Bureau of Sewerage Tokyo Metropolitan Government” (Bureau de l’Épuration de la Métropole de Tokyo), en date du 25 décembre 2015. Les stations sont situées dans la région de Tama (communes d’Akishima et Hachiouji).
Les échantillons sont des cendres d’incinération des boues d’épuration. Ils ont été collectés entre le 2 et le 15 décembre. Les radioactivités relevées vont de 21 à 25 Becquerels/kg. Les mesures font état de 1450 Becquerels/kg de Cesium 134/137. La présence de césium 134 radioactif à 250 Becquerels/kg démontre qu’il provient de la centrale de Fukushima.
Malgré ces valeurs jugées faibles, cette contamination est très récente et continue, car l’iode 131 à une période courte. C’est donc une preuve de la non maitrise de l’accident contrairement à la version officielle : les cœurs de la centrale se dégradent toujours.

> Le 16 février 2016, une station privée de surveillance de la radioactivité, la “Iwaki citizen’s radiation measurement station” déclare avoir relevé en décembre 2015 : 559 Becquerel/kg de Cesium 137 dans les poussières d’un aspirateur de Tokyo. L’échantillon provient du quartier Edogawa de Tokyo. La “Iwaki citizen’s radiation measurement station” a aussi relevé 121 Becquerel/kg de Cesium 134/137 dans la poussière d’un aspirateur du quartier de Setagaya, et 111 Becquerel/kg de Cesium 137 dans un autre échantillon venant de la ville de Kawasaki. La dépêche précise que les autres radionucléides n’ont pas été testés.

> Fukushima s’inscrira probablement dans l’histoire comme la plus grande dissimulation du vingt et unième siècle : les gouvernements et les entreprises du nucléaire n’informent pas les citoyens des risques et des dangers. Au Japon, ce sont des associations, des citoyens et des militants, des blogueurs, qui procèdent à des mesures, recensent les informations et les diffusent….


> Photos du haut. Tsunehisa Katsumata, Ichiro Takekurowere et Sakae Muto,  de gauche vers la droite.


> Sources. 20 minutes. Trois ex-dirigeants de Tepco jugés. >>> Lien.
AgoraVox du 1er mars 2016. >>> Lien.
Fukushima, le blog de Philippe Hillion. >>> Lien.

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