Les nouvelles Précieuses ridicules. 

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Dans un article paru le 11 juillet 1998 dans Le Point (comptons, ça date de presque 20 ans), intitulé “Le sexe des mots”, Jean-François Revel avait vu les choses venir. En somme, la querelle actuelle découle du fait très simple qu'il n'existe pas en français de genre neutre comme en possèdent le grec, le latin et l'allemand. Il en résulte qu’en français, des féminins et des masculins sont purement grammaticaux, et pas sexuels. Et, dans la langue française, l'absence du genre "neutre" condamnerait à choisir arbitrairement un genre, disait Jean-François Revel. 
Mais leur genre n'a rien à voir avec le sexe de la personne qu'ils concernent. Homme, d'ailleurs, s'emploie tantôt en valeur neutre, quand il signifie l'espèce humaine, tantôt en valeur masculine, quand il désigne le mâle. Confondre les deux est proche de l’incompétence et conduit aux embrouilles sur la féminisation du vocabulaire et l'écriture inclusive. 
Voilà un large extrait de l’éditorial de Jean-François Revel sur la féminisation des mots :

La querelle actuelle découle de ce fait très simple qu’il n’existe pas en français de genre neutre comme en possèdent le grec, le latin et l’allemand. D’où ce résultat que, chez nous, quantité de noms, de fonctions, métiers et titres, sémantiquement neutres, sont grammaticalement féminins ou masculins. Leur genre n’a rien à voir avec le sexe de la personne qu’ils concernent, laquelle peut être un homme.

Homme, d’ailleurs, s’emploie tantôt en valeur neutre, quand il signifie l’espèce humaine, tantôt en valeur masculine quand il désigne le mâle. Confondre les deux relève d’une incompétence qui condamne à l’embrouillamini sur la féminisation du vocabulaire. Un humain de sexe masculin peut fort bien être une recrue, une vedette, une canaille, une fripouille ou une andouille.

De sexe féminin, il lui arrive d’être un mannequin, un tyran ou un génie. Le respect de la personne humaine est-il réservé aux femmes, et celui des droits de l’homme aux hommes ?
Absurde !
Ces féminins et masculins sont purement grammaticaux, nullement sexuels.

Certains mots sont précédés d’articles féminins ou masculins sans que ces genres impliquent que les qualités, charges ou talents correspondants appartiennent à un sexe plutôt qu’à l’autre. On dit: “Madame de Sévigné est un grand écrivain” et “Rémy de Goumont est une plume brillante”. On dit le garde des Sceaux, même quand c’est une femme, et la sentinelle, qui est presque toujours un homme. 
Tous ces termes sont, je le répète, sémantiquement neutres. Accoler à un substantif un article d’un genre opposé au sien ne le fait pas changer de sexe. Ce n’est qu’une banale faute d’accord.

ecriture-inclusive

Certains substantifs se féminisent tout naturellement: une pianiste, avocate, chanteuse, directrice, actrice, papesse, doctoresse. Mais une dame ministresse, proviseuse, médecine, gardienne des Sceaux, officière ou commandeuse de la Légion d’Honneur contrevient soit à la clarté, soit à l’esthétique, sans que remarquer cet inconvénient puisse être imputé à l’antiféminisme. Un ambassadeur est un ambassadeur, même quand c’est une femme. Il est aussi une excellence, même quand c’est un homme.

L’usage est le maître suprême.
Une langue bouge de par le mariage de la logique et du tâtonnement, qu’accompagne en sourdine une mélodie originale. Le tout est fruit de la lenteur des siècles, non de l’opportunisme des politiques. (…)

Si le gouvernement veut servir le français, il ferait mieux de veiller d’abord à ce qu’on l’enseigne en classe, ensuite à ce que l’audiovisuel public, placé sous sa coupe, n’accumule pas à longueur de soirées les faux sens, solécismes, impropriétés, barbarismes et fautes de langage qui, pénétrant dans le crâne des gosses, achèvent de rendre impossible la tâche des enseignants.

La société française a progressé vers l’égalité des sexes dans tous les métiers, sauf le métier politique.

Les coupables de cette honte croient s’amnistier (ils en ont l’habitude) en torturant la grammaire. 
Ils ont trouvé le sésame démagogique de cette opération magique: faire avancer le féminin faute d’avoir fait avancer les femmes. Le français achèvera de se décomposer dans l’illettrisme pendant que nous discuterons du sexe des mots.

> En conclusion de l’article de Revel, on serait tenté de dire que l’écriture inclusive et la féminisation des mots brutalisent la langue et témoignent surtout d’un manque de clarté de la pensée.

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> Source. Fin du siècle des ombres, recueil d'éditoriaux de Jean-François Revel. Éditions Fayard, 1999. 650 pages. Format 15 x 23 centimètres. 36 euros.

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