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Les plantes médicinales bientôt interdites en Europe ?

Une association poursuivie en justice pour vente "illégale" de graines de tomates et autres fruits et légumes (affaire KoKopelli)… Un horticulteur perquisitionné et le contenu de son ordinateur saisi par la Répression des Fraudes, parce qu’il vantait le purin d’ortie pour soigner les jardins. Une entreprise condamnée pour avoir vendu de la prêle des champs sans autorisation de l’Union Européenne. Et des agriculteurs bio, accusés de préconiser de pesticides naturels tels que l’huile de neem et de margousier, utilisés depuis des siècles comme antiparasitaires naturels. 

Dans ce qu'on a appelé "la guerre de l’ortie", le fait de légiférer l’emploi de l'ortie et du purin d’ortie, exprime la tentative de rendre délictueux l’usage et la diffusion des savoirs relatifs aux plantes… On peut craindre que pour les plantes médicinales, on avance vers le même scénario. Nous sommes face au problème qui apparaît pour d’autres ressources naturelles en ce moment: l’eau, les semences, l’ortie ou les plantes médicinales sont au coeur d’une lutte entre ceux qui souhaitent avoir le monopole commercial sur ces ressources, et ceux qui estiment qu’elles font partie du patrimoine universel…


Aujourd'hui, des remèdes aussi simples que l’ail en gélule, les tisanes de romarin sont-ils  menacés ? Deviendront-ils illégaux comme le dit la pétition du  Collectif pour la Défense de la Médecine Naturelle ?

La vente d’une plante en tant que médicinale (c’est à dire délivrée avec des indications thérapeutiques) sera interdite tant qu’on aura pas obtenu une AMM (autorisation de commercialisation) auprès de "The Committee on Herbal Medicinal Products" (HMPC). L’Union Européenne voudrait empêcher l’usage de ces remèdes qu’elle ne s’y prendrait pas autrement. Car si l’on peut vendre des herbes médicinales sans être autorisé à dire qu’elles sont médicinales, comment le consommateur peut-il s’y reconnaître et distinguer un remède d’une herbe pour assaisonnement ? Les autorités vont-elles nous obliger à consulter le médecin pour un bobo, à utiliser les médicaments chimiques, à grever le budget de l'Assurance maladie ? Bientôt, plus de choix ? Est-ce ce qui menace les citoyens de l’Europe ?

Une prochaine directive Européenne inspirée par les multinationales pharmaceutiques est sur le point d'interdire les remèdes médicinaux à base de plantes, utilisées depuis des milliers d’années (et sans les effets secondaires des médicaments modernes issus de la pétrochimie). La nouvelle directive s'appelle THMPD (Traditional Health Medical Produts Directive) et porte la référence Directive 2004/24/EC), elle doit entrer en vigueur le 30 Avril 2011.

Quelles seraient les conséquences de cette directive ? Pour faire valoir l’effet d’une plante qui est du domaine public et dont les caractéristiques sont exposées dans les livres les plus anciens, les fabricants devront réunir des rapports d’experts, des études, et constituer des dossiers qui coûteraient environ 100 000 à 200 000 euros par dossier (et le nombre d’espèces de plantes médicinales s’élève à vingt mille dans le monde). Mais les producteurs d’herbes médicinales n’ont pas les moyens des multinationales pharmaceutiques, ils ramassent les plantes dans la nature à l’état sauvage et de façon artisanale. 

La directive THMPD est-elle faite  pour "couler" les médecines douces basées sur les plantes... et à priver les consommateurs d'une de leurs libertés ? S'agit-il d'une interdiction totale en bonne et due forme ?

Pas tout à fait, car l'application de cette directive n'interdira pas les tisanes, onguents ou sachets d'herbes traditionnelles vendues en dehors des pharmacies, ni la culture des plantes concernées. Actuellement il y a en France 148 plantes médicinales "libéralisées" (disponibles hors pharmacie) inscrites à la pharmacopée, comme la bourrache, l'eucalyptus, la mélisse, la verveine, etc


Après les affaires du Vioxx, de l’Avandia, du Médiator, du Buflomédil, ces "médicaments" toxiques qui déconsidèrent les producteurs de médicaments, le lobby de l'industrie pharmaceutique ne renonce pas. On dirait qu’il veut contrôler tout le marché et ne laisser aucun espace aux plantes ou au remèdes naturels. Les tisanes et autres préparations naturelles ont soulagé des générations d'humains pendant des siècles et ont largement fait leurs preuves, c'est un savoir faire acquis par des milliers d’années de pratique. On peut craindre que les technocrates de Bruxelles soient tentés de limiter leur usage... Avant de les interdire, craignent les plus soupçonneux  qui s'expriment par la pétition du Collectif pour la Défense de la Médecine Naturelle. 

Pour l'administration de Bruxelles, la définition du médicament traditionnel à base de plantes suppose un usage depuis au moins trente ans, dont quinze au sein de l’Union européenne. Il a fallu près de deux ans de travail de plusieurs dizaines d’experts représentants vingt-sept pays pour que la commission HMPC1 (The Committee on Herbal Medicinal Products) reconnaisse aux graines de fenouil commun ses indications de drogue antispasmodique expectorante ou digestive, indications connues depuis des siècles dans les cultures euro-méditerranéennes et chinoises. Le cas de la feuille de vigne rouge (Vitis vinifera L. ssp.) aura pris trois ans. A ce jour, la liste communautaire des plantes autorisées comprend cent quarante neuf plantes alors que la Commission en prévoyait plus de cinq cents. De quoi occuper son temps !


Pour mieux comprendre ce qui inquiète les défenseurs de l'usage des plantes médicinales, il faut savoir que l'Europe tend à placer l’alimentation et la médecine sous le contrôle de de l’agrobusiness et de l’industrie pharmaceutique en procédant à des reclassements, comme c'est le cas aux USA, ou par exemple en favorisant les OGM. Pour l'administration des USA, les aliments et les médecines traditionnelles sont considérés comme relevant du commerce plutôt que la santé publique et des droits de l’individu. Cela place les intérêts des grandes entreprises (plutôt que les besoins des populations), au centre des lois sur les aliments et les plantes. C’est cette distorsion qui apparaît dans les déclarations, qui nous semblent absurdes, de la Food and Drug Administration (FDA), affirmant par exemple que les Cheerios (céréales pour le petit-déjeuner) sont presque des médicaments simplement parce que leur fabricant affirme que c’est "bon pour la santé". On observe que la Federal Trade Commission (FTC) a pris part à ce processus.

Sachez qu'au Canada, sous la pression du lobby de l'industrie pharmaceutique, une loi (dite Bill C-51) a été votée, qui peut conduire en prison celui qui a fait pousser de simples herbes aromatiques dans son jardin. Voilà le genre d'âneries dont nous sommes menacés.

Et le grand cuisinier Marc Veyrat qui enseigne comment choisir les bonnes herbes dans les prés et les ruisseaux alpins, sera-t-il un jour répréhensible ?

Est-ce que nous avançons à petits pas vers une société qui ressemblera à celle imaginée par George Orwell dans "1984" ?


> L'association européenne, Alliance for Natural Health (ANH) dépose actuellement un recours pour faire condamner l’UE pour abus de pouvoir. Le collectif pour la défense de la médecine naturelle met à disposition une pétition en soutien à l’action d’ANH qui a déjà recueilli plus de 100 000 signatures, malgré une argumentation "à l'emporte pièce". 

> Résumé de : Collectif pour la Défense de la Médecine Naturelle, Hoaxbuster et AgoraVox.

> Vous pouvez lire le texte de la pétition sur le web (et signer si vous le voulez), voici l'adresse : http://www.defensemedecinenaturelle.eu/signerlapetition.php