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Europe. La majorité est abstentionniste !

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> Le fait majeur de ces élections européennes, quoi qu’en disent les politiciens et les médias, c’est l’énorme taux d’abstention qui est, à mes yeux, une défaite pour l’Europe et pour la démocratie. En s’abstenant, 60% des électeurs ont clairement dit qu’ils ne se reconnaissent pas dans le parlement européen, ni dans les partis, ni dans les listes qui prétendent les représenter. Ce geste massif de désintérêt et de rejet, ne semble pas perçu par les hommes politiques, ni les journalistes, qui pérorent sur les plateaux des télévisions, et tournent le dos à la réalité.

Ainsi, avec 40 % des suffrages, le parlement européen pourrait être désormais qualifié de chambre de mal élus. Se partageant les morceaux d’une part de gâteau minoritaire, les listes élues (même les premières) ne représentent qu’un peu de pas grand chose… Placée en tête par le suffrage universel, avec 28% votes des 40% d’électeurs qui sont allés voter, la liste UMP n’a finalement rassemblé que 12% des électeurs inscrits. La liste  socialiste et celle des verts atteignent chacune environ 7% des inscrits seulement, de quoi les amener à un peu de modestie, et je ne parle pas des autres…! L’Europe et ses institutions se voient en quelque sorte désavouées par la très grande majorité des citoyens. 

> Un bref retour en arrière et quelques exemples permettent de comprendre comment on en est arrivés là, et comment (à peu près) les abstentionnistes perçoivent l'Europe.

La Communauté européenne du charbon et de l’acier (ancêtre de l’Europe actuelle), devait apporter la modernisation industrielle et la prospérité. Elle a causé la fermeture des mines de charbon et de fer, et les premières cohortes de chômeurs. 

La suppression de la réglementation par les états a, certes, “libéré” les marchés, mais au prix de fermetures d’entreprises, d’exploitations agricoles, et de l’augmentation du chômage.

L’ouverture de l’Europe à un nombre de pays de plus en plus élevé a été réalisée à la hâte et à marche forcée. Elle accélère le processus de délocalisations, de fermetures d’entreprises, et la montée du chômage.

Les votes négatifs des Français, des Irlandais, des Hollandais, lors de récents référendums sur le projet de constitution ou le traité de Lisbonne, ont été niés par la classe politique. C’est ainsi qu’en France le vote du peuple souverain a été contourné par un artifice, et que certains veulent faire revoter les irlandais (jusqu’à ce qu’ils votent “bien” ?). Appelons la chose par son nom :  un déni de démocratie.

On nous avait promis l’Europe des peuples et l’Europe sociale, nous avons à la place l’Europe des entreprises et l’Europe du chômage. 

On peut le constater, le lire et l’entendre à longueur de journée : ceux qui nous gouvernent n’ont plus de projet politique, à la place ils comptent. Pire, ils comptent mal.

> Bien que doté de quelques nouveaux pouvoirs, le Parlement européen n’est pas vraiment un parlement, il n’en possède ni les compétences, ni les prérogatives, ni la légitimité. Parce que l’Union européenne n’est pas une construction supranationale ou fédérale, mais intergouvernementale.

Le pouvoir législatif du Parlement européen est très limité, il est en réalité soumis à celui du Conseil présidé à tour de rôle par les chefs d’État européens. Pour l’essentiel, c’est la Commission de Bruxelles qui a l’initiative des actes législatifs. Si le Parlement européen “peut, à la majorité absolue, demander à la Commission de soumettre toute proposition appropriée sur les questions qui lui paraissent nécessiter l’élaboration d’un acte “,  la Commission peut toujours rejeter sa demande. 

Le Parlement européen n’a pas de pouvoir pour décider de la politique étrangère, de la politique monétaire, ni de la politique commerciale commune. Comme il ne peut intervenir sur les recettes, il n’a pas de véritable pouvoir budgétaire. Il ne peut pas contrôler les capitaux, il ne peut légiférer sur la concurrence et la politique économique, ni la politique agricole commune (PAC). Il ne peut intervenir dans le contrôle du respect des droits fondamentaux, ni la politique judiciaire. La liste n’est pas complète, mais je dois faire court…

Quant à notre chambre des députés, et aux autres parlements nationaux, nos élus se voient contraints, pour l'essentiel, d’adopter les dispositions de la Présidence, de la Commission et des technocrates de Bruxelles.

En résumé et en un mot (du général De Gaulle), l’Europe est devenu un “machin” quasi incompréhensible pour les européens... À tort ou à raison, ils sont nombreux à penser que ce machin est ennuyeux, et que souvent il fait mal.

...Et voilà pourquoi les abstentionnistes s’abstiennent.

Tous les "vainqueurs" de l'élection du 7 juin 2009 sauront ils en tenir compte ?



> Cet article contient des extraits de l’intéressante enquête “Les menus pouvoirs du Parlement européen”, publiée par le Mouvement politique d’éducation populaire (MPEP). http://www.m-pep.org/spip.php?article1352


> Je vous conseille le très intéressant article de Jacques Sapir  : "Cinq leçons d'une élection"

http://www.arhv.lhivic.org/index.php/2009/06/11/1014-cinq-lecons-dune-election


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