Belleville ou Malevil sur Loire ?

Illustrations

1. Malevil, affiche détournée

2. Stéphane Lhomme

3. Centrale de Belleville et Loire asséchée, photomontage

4. Nicolas Sarkozy en Superman radioactif

Si la sécheresse se prolonge cet été, quarante quatre réacteurs nucléaires situés en bord des fleuves ou des rivières pourraient être arrêtés (il y en a cinquante huit au total en France). Notre pays serait alors en pénurie d'électricité, mais surtout en danger d'un accident nucléaire, estime l'Observatoire du nucléaire dans un récent communiqué. Bernard Stéphan développe l'information dans le Berry républicain du 1er juin. En cadeau, il offre une petite carte instructive : pour ceux qui ne le sauraient pas encore, les berrichons sont encerclés par les centrales !

Les centrales nucléaires sont situées au bord des cours d'eau où elles puisent pour un refroidissement vital. Ce qui leur impose de nombreuses contraintes. Elles doivent respecter des normes de débit avant de prélever l'eau nécessaire au refroidissement de leurs réacteurs. En conséquence, EDF doit surveiller et anticiper en permanence l'évolution du débit des cours d'eau. Quand le débit de la Loire descend sous soixante mètres cubes par seconde en cas de forte chaleur, les quatre centrales, qui pompent entre trois et dix mètres cubes par seconde à plein régime, doivent se coordonner pour maintenir un niveau d'eau suffisant sur le fleuve.

Selon l'Observatoire du nucléaire, vingt deux réacteurs sont ainsi susceptibles de manquer d'eau pour leur refroidissement. Dans notre région, ce sont les centrales de Belleville dans le Cher, Dampierre dans le Loiret, Saint-Laurent dans le Loir-et-Cher, Chinon dans l'Indre-et-Loire, Civaux dans la Vienne. Mais il y a aussi Golfech (Tarn-et-Garonne),  Chooz (Ardennes), Cattenom (Lorraine). Or il est indispensable de continuer à refroidir les réacteurs mis à l'arrêt pour manque d'eau... et on a à peine dix heures devant soi avant le début de fusion du cœur de réacteur. La "force d’intervention rapide" avec ses moteurs Diesel, pour intervenir "simultanément sur six réacteurs en vingt quatre à quarante huit heures, et faire face à un accident du type de celui de Fukushima", est donc largement insuffisante, comme le souligne Annie Lobé sur le site Santé publique (déjà cité dans gilblog).

Les centrales doivent effectuer une bonne dilution des effluents radioactifs qu'elles rejettent dans les cours d'eau. En dessous d'un certain débit (30 mètres cubes par seconde pour la Loire), les centrales stockent les effluents radioactifs dans des bâches. Quand le fleuve retrouve un débit suffisant, les centrales peuvent à nouveau procéder aux rejets. Mais au bout de plusieurs semaines, si les stockages sont pleins, il faut arrêter les réacteurs... Et donc les refroidir. Ça se complique...

Depuis le 1er juin, le fonctionnement de la tranche numéro deux de la centrale de Civaux est stoppé. EDF dément que le réacteur ait été mis à l’arrêt à cause de la sécheresse : pour l'entreprise il s’agit "d’optimiser la moindre demande de consommation d’électricité". Mais la sécheresse se prolongeant, l’arrêt d’un réacteur à Civaux pourrait n’être que le premier d’une longue série, déclare Stéphane Lhomme (Président de l'Observatoire du nucléaire, et candidat pour représenter l'écologie à l'élection présidentielle)), dans le 10|12 de France Info le 2 juin. Le débit de la Vienne – qui pourrait passer sous le seuil d’alerte des dix mètres cubes par seconde – a nécessité cette première mise en sécurité de réacteur nucléaire. Le seuil de dix mètres cubes par seconde correspond justement à la limite en deçà de laquelle EDF est tenue d’arrêter un réacteur à Civaux, ajoute-t-il.

Toujours selon Stéphane Lhomme, "un accident nucléaire grave est possible : même arrêté, un réacteur doit être refroidi et une fusion de coeur peut se produire si le débit d'une rivière est trop bas pour assurer ce refroidissement minimal". 

Lors de la réunion de crise du "comité sécheresse" le 16 mai 2011, la ministre de l’écologie Nathalie Kosciusko-Morizet a évoqué la nécessité de redéfinir la gestion du parc atomique français en ces temps d’intenses chaleurs, constatant "la baisse du débit d’eau et l’augmentation de la température, qui ont un impact sur le processus de refroidissement".  Elle a ajouté : "en dernier recours, si le débit d’eau est trop faible, le réacteur est arrêté sans dérogation possible". En somme, la ministre confirme l'avertissement prononcé par Stéphane Lhomme....

> Ça n'était pas la sécheresse, la Loire était gelée ! Mais on a frôlé l'accident nucléaire à la centrale de Saint Laurent... Et EDF n'avait pas prévu ça !

Le 12 janvier 1987, vers 9 h 30, le refroidissement du réacteur A1 n’est plus possible car la Loire est... gelée. EDF n’avait pas prévu cette hypothèse ! Le réacteur est arrêté en urgence mais, pour éviter la fusion du cœur, conduisant éventuellement à une catastrophe, il faut évacuer la "puissance résiduelle" : le réacteur continue à dégager de la chaleur pendant un certain temps.

La solution consiste à alimenter la turbine par de la vapeur produite grâce à quatre moteurs au fuel. Mais ces derniers doivent eux aussi être refroidis… par l'eau de la Loire. Ils ne peuvent donc être démarrés et c’est tout simplement en utilisant le courant du réseau EDF que la situation est contrôlée, en contradiction avec toutes les règles de sécurité : celles-ci exigent que le refroidissement soit réalisé par des moyens autonomes, afin de ne pas dépendre d’une éventuelle défaillance du réseau. C’est au contraire ce dernier qui, ce jour là, a sauvé la mise.

Mais, une fois de plus, le drame a été frôlé : le réseau électrique de l'ouest de la France s'effondre vers midi suite à une panne de la centrale thermique de Cordemais ! A quelques dizaines de minutes près, c’était un nouvel accident nucléaire à Saint Laurent… (Extrait du livre de Stéphane Lhomme : "L'insécurité nucléaire" http://observ.nucleaire.free.fr/loire-gelee.htm)

> Tous ces exemples montrent l'existence d'un danger bien réel. Tant pis si ça semble un mauvais scénario catastrophe, mais il faut faire le rapprochement de ces informations et répéter que les explosions de Tchernobyl et Fukushima ont été la conséquence d'enchaînements d'incidents ou d'accidents mal maîtrisés. 

C'est sans doute une des raisons qui animent les soixante dix sept pour cent de français  qui veulent que notre pays sorte du nucléaire. Selon un sondage IFOP publié le 5 juin par le Journal du Dimanche, 77% de nos concitoyens se prononcent sans équivoque : 15% des français souhaitent un arrêt rapide du programme et des centrales, 62% préfèrent une sortie progressive d’ici vingt ou trente ans, et 22% seulement souhaitent la poursuite du programme nucléaire.

Nicolas Sarkozy, d'habitude si friand de sondages, ignore sans doute celui là, et prononce à Cosne le 7 juin, des paroles dont on se souviendra longtemps. Parlant des centrales nucléaires, le chef de l'État a déclaré "je n'ai pas l'intention de renoncer à ces avantages absolument considérables de l'économie française" ! Comme la société Tepco, qui ne voulait pas non plus renoncer aux avantages absolument considérables de Fukushima pour son économie ! Nicolas Sarkozy, dont l'hémisphère droit du cerveau est consacré aux affaires et l'hémisphère gauche à la rentabilité, n'a sans doute plus assez de neurones pour comprendre ce que veulent les français !

Le même jour à Cosne, Nicolas Sarkozy, a également donné un nouvel exemple des galimatias politiques dont il a le secret, en prétendant que l'écologie n'est pas au service des hommes et qu'elle les oppose à la nature. Comprenne qui pourra ! C'est dans Le Berry du 8 juin, page 5.

> Pur ceux qui hésiteraient encore, voilà quelques raisons de plus pour se rendre devant la Centrale de Belleville samedi 11 juin à 18 heures, et répéter :  "sortons du nucléaire".


> Sources. L'Observatoire du nucléaire : http://observ.nucleaire.free.fr/

Zegreenweb : http://www.zegreenweb.com/sinformer/energie/les-centrales-nucleaires-francaises-affectees-par-la-secheresse,25670

Le Berry républicain : http://www.leberry.fr/editions_locales/bourges/nucleaire_la_surete_fait_debat_sur_le_bassin_de_loire@CARGNjFdJSsBER8EBhw-.html

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